Préparer son accouchement … Vraiment?

Lorsque j’anime des rencontres prénatales, en privé ou en groupe, l’expression « préparation à l’accouchement » revient fréquemment dans nos échanges. Et pour cause, les couples souhaitent habituellement savoir comment ça se passe, un accouchement! Ils veulent voir venir, anticiper, essayer de prévoir pour ne pas être pris au dépourvu. On apporte quoi? Ça commence quand et comment? Ça se déroule comment? Comment peut-on gérer la douleur? Et etc… Et l’une des questions qui me taraude le plus depuis mes tout débuts en tant que Doula est la suivante : peut-on préparer ou aider le processus involontaire qu’est l’accouchement?

Préparer l’imprévisible?

Premièrement, laissez-moi vous expliquer ce qui m’attire davantage dans l’expression « éducation prénatale » par rapport à « préparation prénatale ». Lorsque l’on éduque plutôt que prépare, nous donnons de l’information, nous expliquons le processus physiologique de la naissance et ce qui peut le perturber (ce que certaines d’entre nous appelons les éléments à effet « prédateur »). Nous permettons aux couples de prendre des décisions tenant lieu de choix éclairé et qui s’appuient sur leur propre gestion et conception des risques associés à telle ou telle intervention ou non-intervention. Il est primordial alors de décortiquer le rôle des hormones impliquées durant le processus de l’enfantement et ce qui risque de les perturber. À ce sujet, Michel Odent décrit parfaitement tous ces aspects dans ces nombreux ouvrages, particulièrement, dans celui intitulé « Le bébé est un mammifère ». Également, au-delà de concepts théoriques qui sont bien beaux sur papier, mais qui peuvent tellement varier d’une femme à l’autre et même d’un accouchement à l’autre, on met plutôt l’accent sur le fait que chacune peut et sera amenée à vivre l’expérience de l’enfantement de manière particulière et dans une séquence que l’on ne décrira pas forcément dans les livres (par exemple, une maman enceinte de son premier bébé qui ne ressent pas de contractions douloureuses alors que son col est dilaté à 7 cm, une autre dont les contractions sont régulières et l’intensité toujours croissante depuis quelques heures sans pourtant sembler agir au niveau de la dilatation du col…). Alors, pour toutes ces situations qui ne respectent pas forcément le schème du processus typique de l’accouchement, ne serait-il pas préférable de s’attarder davantage à éduquer plutôt qu’à préparer? Et lorsque je dis éduquer, je pense aussi au fait d’inviter les parents à se questionner sur leurs propres besoins, sur ce qu’ils peuvent poser comme jalons afin d’optimiser le vécu d’une expérience d’accouchement positive, ce qui leur parle et leur ressemble (choix des personnes présentes, du lieu de naissance [domicile, maison des naissances, centre hospitalier] et de la personne assurant le suivi [sage-femme, médecin omnipraticien, gynécologue-obstétricien], trame musicale, huiles essentielles, massages, ballon de naissance, visualisations…).

Le plan de naissance

Je constate régulièrement que pour plusieurs couples, la raison d’être du plan de naissance est un peu floue. À prime abord, certaines femmes ne souhaitent pas en rédiger un car elles ont peur que celui-ci leur crée des attentes et qu’elles seront déçues si, au final, les choses ne se passent pas « comme prévu sur le plan de naissance ». D’autres y tiennent mordicus, car il va dans le même sens que la préparation ou la planification de l’accouchement. Dans cet ordre d’idée, je préfère de beaucoup l’appellation « souhaits » ou « projet » de naissance, car il laisse place à l’ouverture. Il peut tantôt servir à décrire les interventions souhaitées et celles non désirées, tant pour la maman que pour le bébé et selon différents contextes , tantôt servir d’aide-mémoire pour la Doula ou encore la sage-femme sur des aspects un peu moins techniques ou médicaux, par exemple : guider maman dans des visualisations, penser à lui proposer le miroir lorsque la tête commence à être visible, l’aider à prendre telle ou telle position au moment de l’expulsion, etc. Dans un cas comme dans l’autre, en contexte hospitalier ou avec un suivi sage-femme, le projet de naissance ou les souhaits de naissance dépassent alors le plan rigide : il devient un outil de discussion au sein du couple et avec le personnel hospitalier ou de la maison de naissance. Il amène à se questionner, à remettre en question, à s’informer puis à faire des choix éclairés. Il n’enferme pas le processus de l’accouchement dans une petite boîte et ne devrait pas donner l’impression (ou la pression) aux futurs parents de devoir performer et que tout se passe exactement tel que… planifié!

Planification versus intention

Il m’arrive parfois d’accompagner des mamans pour qui la vision de leur accouchement est on ne peut plus claire : elles s’imaginent dans telle ou telle position, faisant tels sons, avec papa qui fait tel massage, que le travail début à tel moment de la journée…! Et, croyez-le ou non, leur accouchement se passe EXACTEMENT de cette façon! Coïncidence? Meilleure préparation/planification? Je ne crois pas… Ma petite théorie sur le sujet, est que ces mamans se sont simplement laissées imprégner par leur ressenti… elles ont mis beaucoup d’intention dans leur expérience d’accouchement… elles l’ont visualisé, encore et encore, certaines ont fait beaucoup d’autohypnose pendant la grossesse, d’autres encore ont pratiqué l’autosuggestion presque quotidiennement… Bien qu’il ne me soit pas arrivé fréquemment d’assister à ces naissances, il en demeure que pour moi, cela n’a rien à voir avec la simple pensée magique « de l’accouchement  parfait », qui se passe comme cela, tout bonnement, parce que maman était très zen durant la grossesse et qu’elle a décidé de ne rien lire, rien préparé, rien questionné… Je ne pense pas non plus que ce soit le dénouement d’un processus intellectualisé : je VAIS accoucher de telle manière, je VEUX tout contrôler durant ma grossesse, je VEUX que ça se passe comme ci ou comme ça. Mon impression, suite à quelques observations, c’est plutôt que ces mamans ont véritablement pris le temps d’entourer d’intention l’expérience qu’elles allaient vivre, tout comme leur grossesse, vécue comme un continuum, sans début, ni étapes, ni fin. Elles ont fait des choix éclairés, elles ont mis la peur de côté en apprenant à avoir confiance dans leur capacité d’enfanter,  elles se sont entourées des personnes qui sauraient les accompagner dans ce processus. Depuis que j’ai eu la chance de côtoyer ces femmes, ces couples, il est devenu clair pour moi que l’intention était quelque chose de très fort, quelque chose de très important et de bien différent de la pensée magique du « tout-ira-bien » ou de la planification/préparation intellectualisée!

Et vous, votre expérience d’enfantement s’est-elle déroulée… comme prévue? Quelle est votre opinion au sujet de la préparation à l’accouchement, du plan de naissance, de l’intention?

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